femme qui procrastine

LA PROCRASTINATION : CESSER L’IMMOBILISME

Avant de voir comment cesser de tergiverser, sans bouger, il convient de préciser que la procrastination n’est pas la base du problème. Le vrai problème est une histoire personnelle qui a entraîné une habitude apprise.

Préambules indispensables

La procrastination est une tentative d’éviter les peurs, les doutes de soi.

Le premier travail consiste alors à se concentrer sur les problèmes qui sous-tendent les craintes, sur les attitudes adoptées pour tergiverser, sur les idées irrationnelles qui naissent en boucle face à toute action à réaliser qui provoque un état de malaise intense et conduit à tout faire pour ne pas faire.

Le second travail est de chercher à définir s’il s’agit de procrastination détendue ou de procrastination anxieuse ?

Comme je les ai définies dans mon article précédent, la procrastination tendue et anxieuse conduit à une vraie souffrance permanente liée à des critiques internes. La procrastination détendue permet d’embobiner et de nier la réalité.

Chaque procrastinateur doit composer avec ses propres émotions, avec ses propres cognitions, ses propres pensées inconscientes.

Comment cesser de tergiverser

       Agir pour soi

Si le procrastinateur n’a jamais appris à s’organiser, si chaque action réalisée a été faite par quelqu’un d’autre, si on ne lui permettait pas de ne pas finir quelque chose entamée, alors il s’agit de travailler sur les croyances tournant autour de l’idée que tout travail mérite récompense.

Comme pour ce que j’ai écrit pour les couples, il est évident que le bonheur vient de soi et que ce qui nous vient des autres est un plus, une sorte de bonus.

S’organiser pour se responsabiliser

La procrastination se surmonte progressivement. Procrastiniser, c’est comme toute addiction, puisque la procrastination est une habitude. Il est parfois utile de décomposer l’action à faire pour rendre les marches de l’escalier plus facilement surmontable et de planifier la tâche minimum en la limitant dans le temps. La clé est d’apprendre à démarrer une habitude sur une première tâche.

Par exemple : Jean doit partir de chez lui le matin avant 8h pour se rendre au travail. Cette heure de 8h est devenue pour lui la vraie bête noire de sa journée. Il fait donc tout pour éviter 8h. En décomposant ce qu’il est nécessaire de faire avant de sortir, en donnant un temps minimum à la première marche, en notant ce minutage sur la liste des marches de son escalier : partir, il commence à contrôler le départ et fait de l’enchaînement des actions une routine, non plus uniquement focalisée sur franchir la porte, mais sur un vrai escalier qui tient compte de ses envies comme de ses contraintes.

Tenir un journal de procrastination

Certains procrastinateurs tiennent un journal dans lequel ils notent en détail leurs pensées et leurs sentiments associés aux actions. Cela permet de prendre conscience de leurs craintes, de leurs excuses, de leurs habitudes à détourner leur attention de ce qu’ils ont à faire. Basée sur l’idée que cette façon permet de concevoir un contrôle sur la prise en charge des actions, ils peuvent ainsi parvenir à assumer les peurs.

D’autres procrastinateurs demandent à des amis de les pousser à agir.

Quand rien ne fonctionne

Beaucoup de procrastinateurs résistent à ces méthodes. Ils ne parviennent pas à gérer, à s’organiser, à trouver une réelle motivation à agir, à commencer à penser de façon plus rationnelle.  Ils ne parviennent pas à faire des plans réalistes, à cibler leurs objectifs.

Cela revient à dire à un obèse de faire ceci et cela pour maigrir, à dire à un alcoolique qu’il devrait cesser de boire, à dire à un fumeur qu’il doit s’arrêter de fumer.

Quand il ne tergiverse pas, le procrastinateur se dit :  » il faut que j’arrive à faire !!!  » Mais rien ne lui permet de faire. Ni les bons conseils des autres, ni les bonnes résolutions. C’est l’enfer, comme pour l’obèse, l’alcoolique ou le fumeur. La peur est immense.

Le changement de vie ne se produit que quand les émotions sont gérables et gérées. C’est le calme, la sérénité retrouvée qui va fournir la motivation à persévérer, à devenir une personne différente qui a dépassé ses peurs de l’incertitude. Car la peur de l’avenir pour le procrastinateur est très forte, preque trop forte. Le rappel des récompenses et des sanctions aux actes est pire que tout.

Le procrastinateur détendu aura besoin de motivation très intense, peut être une nouvelle valeur de vie ou une gestion des inquiétudes et des tensions, c’est à dire quelque chose de beaucoup plus fort qu’une auto-critique, qui finalement revient à se dévaloriser en permanence.

Chaque procrastinateur développe ses propres mécanismes d’évitement, comme ses émotions (ses peurs, ses ressentiments, ses besoins), comme ses pensées (ses idées irrationnelles, ses stratégies cognitives).

Les deux types de procrastinateurs évitent tout ce qui est « corvée » et fabriquent leur propre stress, leur propre malaise en se répétant « Je déteste faire ça », « Ce travail est trop lourd », « Ce n’est pas possible de faire ça » ou en se créant des objectifs irréalisables : « je vais tout ranger ce soir », « je vais trouver du travail aujourd’hui ». Ensuite, ils tergiversent.

Bien sur, le travail sur l’estime de soi est essentiel. Travailler la confiance en soi est la base du travail, l’initiation d’un changement d’habitudes. Ce travail permet de modifier la vision du monde et les croyances limitantes.

La procrastination est une habitude. C’est la première chose à comprendre parce que cela permet de modifier cette idée de fatalité qui plane au-dessus de toutes les actions à faire. « Je n’y arriverai pas ». « J’ai toujours fait comme ça. » Il faut affronter la réalité, cesser de se mentir, reconnaitre, nommer et exprimer ses émotions.

Le procrastinateur détendu

Celui qui évite toute idée d’efforts et ne se focalise que sur sa recherche de plaisir, à moins d’être confronté à un événement (comme un examen, une date incontournable), conserve le déni de ce qu’il met en oeuvre. En fait, ce type de procrastinateur a besoin d’une crise qui va lui fournir la pression nécessaire à redresser sa vie. Ce n’est que quand il y aura pris de conscience d’une motivation qu’il pourra agir.

Les deux détournements

Les actions non prioritaires : le procrastinateur se noie dans les activités qui ne sont surtout pas la tâche à démarrer : regarder la télé, surfer sur la Toile, manger, jouer, dormir, nettoyer… Une fois plongé dans le détournement, le procrastinateur bloque son anxiété, sa colère, son ennui. Il faut alors chercher à exprimer, à nommer, à retracer.

Les excuses mentales : « Je vais le faire demain », « Je le fais ce soir parce que je travaille toujours mieux le soir ». Ce sont ces pensées qu’il faut parvenir à remplacer par « Je vais faire les courses comme ça je pourrais mieux me distraire ce soir » « Je vais nettoyer mon appartement comme ça je pourrais inviter des amis. » « Je vais téléphoner à ma mère, dès que j’ai quelque chose à dire ». Il faut prioriser la satisfaction, le résultat escompté. « Je vais travailler les sciences pour avoir de bonnes notes dans cette matière et je peux m’attendre à de mauvaises notes en anglais ». C’est le défaitisme qui tue l’action, le pessimisme qui la noie dans l’impossible.

Le procrastinateur tendu anxieux

Tous les conseils donnés par ceux qui entourent le procrastinateur tendu ne fait qu’accroître la pression et les sensations désagréables qui accompagnent chaque action à faire.

Ce procrastinateur a peur de réduire les désagréments de la tâche. C’est ce que je dis à tous ceux qui viennent me voir pour changer quelque chose dans leur vie. Avoir un marteau qui tape sur la tête, ça fait mal. Mais la peur de vivre sans marteau est parfois encore plus grande que le malaise présent. Pour changer, on freine des deux pieds… On ne connait pas la situation nouvelle et on finit par éviter de la connaître en conservant le marteau qui tape, parce que celui là, on sait comment ça marche.

Les conseils comportementaux à ces procrastinateurs tendus et anxieux

1. Tentez de réduire les peurs après les avoir identifiées. La peur d’échouer peut, par exemple, se réduire en prenant conscience que si on échoue ce n’est pas si terrible que ça parce que l’on sait et que l’on peut gérer cet échec. On peut tomber de cheval. Et pour apprendre à monter un cheval, il faut se remettre debout et remonter. Tomber de cheval n’est pas un échec, c’est un essai raté. Remonter, c’est se donner le droit de recommencer.

2. Conservez une trace des évitements des tâches importantes. Quelles excuses avez vous utilisées ? Quelles pensées avez eues ? Quels sentiments ? Quel a été le résultat de l’excuse ?

3. Travaillez la reformulation des tergiversations pour qu’elles deviennent productives

« Je dois terminer » va devenir « Quand vais-je commencer ? »

« Je dois bien faire » va devenir « Je vais me donner du temps pour le faire »

« Je n’ai pas le temps pour regarder la télé, jouer, m’amuser » va devenir « Il est important de me divertir une heure »

« Je ne peux pas réussir » va devenir « J’ai une meilleure chance de réussir si…

Pour le procrastinateur qui a peur d’échouer ou peur de réussir, il faut apprendre à vivre dans le présent, à avoir du plaisir de vivre. Il faut donner la juste place aux doutes et aux inquiétudes.

4. Remplacer les habitudes négatives en habitudes ordonnées. Programmer, planifier sans oublier votre temps pour vous, votre temps ludique, votre temps plaisir. Concentrez votre attention sur le démarrage de l’action. Limitez cette action dans le temps. Donnez vous une récompense qui valorise votre image de vous. Toute action devient plus agréable si elle n’est pas considérée comme difficile, ennuyeuse, interminable.

Les conseils cognitifs aux procrastinateurs tendus et anxieux

Souvent, les conseils comportementaux ne font qu’augmenter la résistance à l’action. Il faut alors tenter de comprendre les luttes mentales souvent inconscientes qui sous-tendent la tergiversation.

Ces personnes là ont des doutes, des peurs qui ont été apprises comme une défense, un moyen d’éviter le danger né de l’idée qu’elles vont tout gâcher, se ridiculiser ou être rejetées. Elles se mettent alors à « fuguer mentalement ». Il faut alors chercher les intentions inconscientes, nommer les peurs, les doutes, les raconter.

C’est tout un travail en techniques PNL pour apprendre à entrer en contact avec les interactions de ses personnages intérieurs. Celui qui dit « Je dois » avec celui qui dit « Je veux », l’un étant comme l’enfant effrayé doit être rassuré par l’autre, cet adulte qui permet de voir un monde plus réaliste, plus valorisant.

Dans la procrastination tout a une place entière, même si chaque procrastinateur les régit de façon différente : les émotions, les cognitions et les facteurs inconscients. Chaque procrastinateur doit trouver sa méthode pour sortir de la tergiversation.

Mais la première action à entreprendre est celle de se dire que l’on peut changer et comme Bandura (1997) le dit, il est utile de se persuader de : « Je peux le faire ».