un couple s'embrassant

LES DÉFAUTS DE COMMUNICATION DANS UNE RELATION

Un des aspects les plus importants dans toute relation est l’efficacité de la communication entre les partenaires. Or, communiquer comporte des pièges qui peuvent mener un couple à s’enliser dans une incompréhension réciproque qui aboutissant à une rupture de communication peut provoquer la séparation.

Le manque de communication

La première raison de ce manque de communication est le stress causé par la difficulté que nous avons à aborder les points qui nous sont importants, et pour lesquels nous pensons que l’autre a des opinions contraires.

Certaines personnes apprennent un système de communication basé sur l’idée que dire aux autres ce que l’on pense et qui va à l’encontre de ce que l’on pense que l’autre pense, fera mal à notre interlocuteur. Or, pour que l’autre sache ce que l’on pense, il n’y a pas d’autre moyen que de l’exprimer.

Dire ce que l’on pense n’est pas obligatoirement faire mal à l’autre. C’est la façon de le dire qui fait mal et non ce que l’on dit.

Imaginons que Martine dise « On va chez ma mère ce week end ». Et imaginons que son mari Pierre n’ai pas envie d’y aller. Il a trois options de réponses.

A : Oui si tu veux.

B: J’ai pas envie de voir ta mère ce week end. Je n’irai pas, mais tu peux y aller si tu veux.

C : Cela m’ennuie de bloquer un week end pour voir ta mère, alors que j’ai très envie de profiter de ce week end pour que l’on fasse quelque chose ensemble. Les vrais week end à nous sont trop rares alors qu’ils sont importants pour moi.

Dans la formulation A, Pierre n’ose pas dire qu’il n’en a pas envie. Dans la formulation B, Pierre rejette la visite chez la belle-mère sans explication. Dans la formulation C, Pierre exprime ce qu’il pense en centrant son refus sur un point positif du couple.

Face à la formulation A, Martine pensera que Pierre est d’accord comme d’habitude. Face à la formulation B, Martine ressentira le rejet de sa mère, comme un rejet contre elle (si Pierre n’aime pas ma mère, alors il ne m’aime pas). Face à C, Martine a toute latitude pour exprimer ce qu’elle pense et chercher à mieux comprendre ce que Pierre pense.

Dans A et B, il y a un manque de communication. La discussion est fermée.

Dans C il a communication. La discussion est ouverte.

Quand on commence à discuter d’un problème, on cherche à être compris. Or, pour être compris, il faut d’abord savoir ce que l’on a envie de dire.

Dit comme cela, cela peut paraître étrange. Mais peu de gens disent ce qu’ils ont envie de dire parce qu’ils ne se sont pas posés la question de savoir ce qu’il avait envie de dire.

Si Pierre n’a pas envie d’aller voir la belle-mère, ce n’est pas parce qu’il ne l’aime pas, mais parce qu’il aime plus Martine et a besoin de la retrouver le week end. Avec la formule C, Pierre a exprimé son besoin. Si Martine exprime le besoin de voir sa mère, il y aura discussion pour trouver un compromis entre le besoin Pierre et le besoin de Martine.

Mais dans les autres formulations, aucun besoin n’est exprimé. Avec la formulation A, Martine ne peut absolument pas savoir ce que pense Pierre. Avec la B, Martine interprétera mal ce que Pierre a si mal exprimé.

Le plus grand danger que peut engendrer le manque de communication est la rupture de la communication. Car, à quoi peut bien être utile les discussions qui ne mènent qu’au silence (comme Pierre dans A) ou aux réponses conflictuelles (comme Pierre dans B) ? Et l’on peut se demander ce qu’est un couple où toute communication n’a plus de place ?

Les attitudes négatives de la communication

Le manque de communication n’est pas le seul défaut. Avoir une attitude négative dans une communication est un autre piège important de toute relation.

Avant d’expliciter les attitudes négatives en communication, j’aimerais revenir sur la définition même du concept « attitude ».

Le concept d’attitude

Ce concept fut LE concept de la psychologie sociale des années 1920-1960(1). À cette époque, les psychologues pensent que les attitudes expliquent les réactions, que ce sont des dispositions mentales qui expliquent le comportement.

Allport en 1935 définit l’attitude comme « un état mental de préparation à l’action organisé à travers l’expérience, exerçant une influence directive et dynamique sur le comportement ».

Oskamp en 1997 la définit comme une « disposition à réagir de façon favorable ou défavorable à un objet particulier ou à une classe d’objets ».

L’attitude peut s’appliquer à des objets très divers : les autres (le voisin, le président…), les objets (la drogue, la voiture…), les concepts (la mendicité, la solidarité … )

L’attitude a une valence (une direction), c’est à dire qu’une attitude peut être positive ou négative (comme le préjugé qui a une dimension évaluative négative).

L’attitude a une force, c’est à dire une intensité variable selon l’implication de l’individu. Située sur un continuum, la force va d’un point totalement favorable à totalement défavorable. Ce sont les sondages qui sont un bel exemple de construction d’échelle d’attitudes.

En 1960, Rosenberg et Hovland mettent en avant les composantes de l’attitude :

1. une composante affective qui concerne les émotions positives ou négatives que l’on a vis à vis de l’objet en question et qui nous prédispose à évaluer cet objet comme étant bon ou mauvais, intéressant ou inintéressant.

2. une composante cognitive qui est en rapport avec nos connaissances et nos croyances

3. une composante conative qui est relative à nos comportements passés et présents.

Ainsi, nos attitudes guident nos émotions qui, elles vont nous permettre d’interpréter la situation. Elles nous permettent de penser et d’agir.

 Les attitudes influencent le comportement et le comportement désigne aux autres nos pensées (tant que nous ne les exprimons pas).

Imaginons que j’ai une attitude positive vis à vis de la reconnaissance de la sensibilité des animaux. Je vais donc avoir tendance à me comporter toujours favorablement vis à vis d’eux. Si je vois une araignée dans un endroit inadapté pour elle (et pour les autres), je vais la prendre et la mettre dans un endroit que je juge adapté.

Imaginons que j’ai une attitude négative vis à vis du racisme. Je vais avoir tendance à me mettre en colère quand je rencontre chez d’autres un comportement qui me montre une attitude positive vis à vis du racisme.

Et c’est là que se pointent les pièges en communication des attitudes négatives, parce qu’elles se traduisent par un comportement et désignent des pensées.

Elias Porter, psychologue disciple de Rogers, a identifié six familles d’attitudes que nous utilisons dans nos relations et qui se traduisent par des « actes de langage ».

Les actes de langage sont ces comportements spécifiques que nous observons chez l’autre et que nous interprétons par une pensée.

L’attitude de jugement : je sais ce que ça vaut

C’est une attitude qui implique un point de vue personnel et se traduit par des phrases comme « Tu aurais pu faire… » « Tu es nul … » « 

Cette attitude est très liée à une attitude de savoir : je sais ce qui est bon, je sais ce qui est mal. Elle renvoie à nos a-priori, nos préjugés parce qu’elle est construite sur notre système de croyances.

Elle est très utile quand elle porte sur les actions des autres.

– Ce n’est pas très réussi ce que tu as fais. Tu as manqué de quelque chose ?

Elle est destructrice quand elle porte sur le partenaire car elle bloque la communication en contraignant l’autre à se mettre sur la défensive.

– C’est nul ce que tu as fait.

L’attitude du conseil : je sais ce qu’il faut faire

Nous adorons avoir réussi à résoudre une situation et nous adorons faire partager notre expérience, faire connaître notre réussite et en faire profiter les autres.

Cette attitude part d’un bon sentiment qui peut être très utile parce qu’elle propose une solution à une situation. Mais trop souvent, nous faisons surtout partager notre propre analyse de la situation, nous ne nous mettons pas à la place de l’autre, nous ne faisons pas attention à ses besoins, nous mélangeons les contextes.

Par exemple, si je vois une personne qui s’apprête à se diriger vers un ascenseur alors que je sais qu’il est en panne, je peux la prévenir :

– Inutile d’aller par là, l’ascenseur est en panne.

Si effectivement, elle allait prendre l’ascenseur, mon conseil peut lui avoir fait éviter de prendre un chemin inutile. Mon conseil est informatif et l’attitude a une valence nulle.

Mais imaginons que je suis en train de raconter un événement négatif qui vient de m’arriver et que mon interlocuteur me réponde : « Tu devrais aller voir le médecin », « Tu dois téléphoner tout de suite »,  » Il n’y a qu’à te faire remplacer ». Or, je raconte l’événement non pas pour avoir une solution mais pour recevoir de l’empathie, pour que l’on me reconnaisse en train de rencontrer un problème. Vexée, renvoyée au rang de la masse, ma communication sera bloquée. Je n’aurais plus envie de parler.

La meilleure utilisation de cette attitude est quand elle existe à partir de la demande de l’autre.

– Et toi, tu ferais quoi, à ma place ?

Si l’autre ne l’a pas demandé, il est fort à parier qu’il n’a pas besoin de connaître la solution mais qu’il a juste besoin de raconter la situation.

L’attitude d’interprétation : je sais ce que ça signifie

Nous cherchons continuellement le sens des comportements des autres. Comme nous voyons les autres agir, mais que nous ne pouvons lire dans les pensées, nous avons tendance à croire que c’est parce qu’il pense ça qu’il fait ça.

C’est d’une telle violence symbolique que cela revient à dire à l’autre : « je comprends le sens de ce que tu fais alors que tu ne le sais même pas ».

Imaginons que l’un des partenaires d’un couple rentre épuisé d’une journée de travail et, sans parler, se réfugie, bras croisés, sur le canapé sans but précis. L’autre aura tendance à penser : « Tiens, il me fait la tête ». Imaginons que le matin même, le couple a eu une discussion un peu plus violente que d’habitude, la pensée : « il me fait la tête », va se transformer en : « il est en colère ».

L’interprétation d’un comportement en pensée n’est justifiée que lorsque l’autre accepte l’interprétation. L’interprétation ne peut être qu’une hypothèse que l’on cherche à vérifier en communiquant : ‘Tu me fais la tête ? »

L’autre peut alors répondre : « Ah, non pas du tout, je suis très énervé et fatigué par ma journée. » ou « Oui, je suis encore un peu en colère. J’attendais un coup de téléphone de toi dans la journée pour en reparler ».

L’attitude de soutien : je sais ce que tu ressens

Cette attitude vise à apporter à l’autre un encouragement, une consolation pour éviter que l’autre déprime ou dramatise.

C’est une bonne attitude si elle apporte un réel réconfort à l’autre. Mais c’est trop souvent une attitude qui se transforme en langage en  » Moi, aussi, tu sais… » « Ce n’est pas de ta faute ».

Cette attitude est perçue par l’autre comme la négation de son individualité. Il est renvoyé à la masse des autres et le soutien le dévalorise.

– J’ai des soucis en ce moment.

– Tu n’es pas le seul ! Ça passera !

L’attitude d’enquête : je sais ce qu’il faut savoir

Cette attitude consiste à poser des questions pour en savoir plus. C’est une bonne attitude si on se met vraiment à la place de l’autre et si les questions qui ne font que compléter l’information de base vont lui permettre de progresser, d’avancer dans son raisonnement, de mieux comprendre la situation.

C’est une mauvaise attitude si on ne fait pas attention à ce qui est essentiel pour l’autre. Cet autre finit par ne pas comprendre ce qui est recherché, ce qui est important. Il est noyé dans son problème et ne peut plus répondre. La communication s’est transformée en interrogatoire et elle est ressentie comme une intrusion ou une manipulation.

– J’ai perdu mon portefeuille.

– Ah bon, mais ça t’es arrivé quand ? Qu’est ce que tu faisais ? Tu as cherché dans l’armoire ? Dans tes poches ? Dans la chambre ? Tu as bien regardé partout ? Et qu’est ce qu’il y avait dedans ? Tu vas faire quoi alors ? etc…

L’attitude de compréhension : dis moi ce que tu vis

C’est l’attitude la plus difficile à avoir qui peut s’avérer la meilleure comme la plus pernicieuse. Elle consiste à adopter l’ouverture, l’attente, l’écoute pour se mettre en reflet de l’autre, s’imaginer dans sa peau. Elle consiste à vérifier que l’on a bien compris : « Si je vous comprends bien, vous pensez avoir eu tort lorsque vous avez fait ça ? »

C’est une très bonne attitude quand elle est maîtrisée parce qu’elle facilite l’expression puisque l’autre est mis en confiance, qu’il se sent écouté, accepté sans jugement.

Mais, basée uniquement sur la reformulation, elle peut être ressentie comme un refus d’engagement, une volonté de ne pas dire sa pensée, comme si on ne s’intéressait pas au problème de l’autre. L’autre peut bloquer sa communication par sentiment d’insécurité.

Conclusion sur les attitudes de Porter

On voit que toute attitude peut être excellente et destructrice à la fois. Ce qui en fait la différence est l’adaptation à l’interaction et non l’adaptation à notre seule personnalité.

Il faut reconnaitre les attitudes qui sont dominantes chez nous pour apprendre à les utiliser au meilleur d’elles mêmes.

Une attitude de soutien peut être excellente pour faire évacuer une émotion.

Une attitude d’enquête peut être excellente quand il s’agit d’ouvrir un « dossier », soulever un problème et être décidé à le résoudre.

Une attitude de conseil peut débloquer une situation.

Une attitude de compréhension peut relancer une discussion quand il y a volonté de comprendre l’autre pour faire avancer une résolution de problème.

(1) Le cocnept d’attitude fut tellement omniprésent dans les études que les premiers chercheurs (les psychologues Thomas et Znaniecki) avaient pensé que la psychologie sociale se définissait par l’étude des attitudes.